Je suis élu d’un territoire rural où les gens bossent dur, commencent à travailler plus tôt, dans des métiers dits de première ligne, essentiels au quotidien de nos concitoyens. Ils sont agriculteurs, artisans, commerçants, personnels soignants, agents des services publics, aides à domicile, agents d’entretien, auxiliaires de vie, transporteurs, livreurs, ouvriers, travailleurs indépendants… Ce qu’ils me disent : « c’est quand on a travaillé et cotisé pendant toute une carrière, on mérite notre retraite. On veut profiter, si tout va bien, de nos années en bonne santé. Pour faire du bénévolat, pour s’occuper des autres, de nos petits enfants… »
Comme moi, ces hommes et ces femmes s’interrogent : pourquoi demander toujours plus d’efforts aux mêmes, ceux qui travaillent et n’ont bien souvent droit à aucune aide ? Alors que l’enjeu majeur aujourd’hui c’est l’incitation au retour à l’emploi dans un contexte où partout il manque de bras !
Pourquoi, alors que notre pays est au bord de la crise de nerfs (crise énergétique, pouvoir d’achat, déserts médicaux, guerre en Ukraine…), imposer maintenant de façon brutale un report de l’âge légal dès 2023, alors le Président de la République se disait encore récemment opposé à cette mesure d’âge ?
Comment le gouvernement peut-il être crédible sur l’aspect budgétaire, alors qu’il a lui même augmenté la dette publique de notre pays de 560 milliards entre 2020 et 2022 ? Et fait adopter sans ciller à grands coups de 49-3, 160 milliards de déficit pour la seule loi de finances pour 2023. Cette réforme, c’est l’arbre qui cache la forêt. Elle n’aurait de sens que dans le cadre d’un changement radical de politique et de garantie sur la fin du chéquier permanent et du « quoi qu’il en coûte ». Car aujourd’hui, c’est un peu l’Etat cigale contre le Peuple fourmi !
Autant de questions (et bien d’autres !) que le débat sur les retraites devra aborder sans détour, en se recentrant sur la priorité du pays, valeur cardinale de notre engagement : valoriser le travail.
En cherchant à élargir la base, c’est-à-dire la quantité de richesses produites, donc le nombre d’heures travaillées/cotisées. Mécaniquement, nous assurerons ainsi l’avenir budgétaire de notre système par répartition.
Aussi, avant de faire travailler plus longtemps ceux qui bossent déjà, remettons au travail ceux qui ne bossent pas et qui sont en capacité de le faire, dans un contexte ou, je le répète, partout il manque des bras.
Luttons contre la fraude avec, exemple concret, la mise en place d’une carte vitale biométrique.
Travaillons sur l’emploi des séniors (56% en France contre 72% en Allemagne pour les plus de 55 ans), le tuteurage avec les jeunes, le cumul emploi-retraite, la retraite progressive, pour sortir du totem de la retraite à 65 ans.
Et ne perdons jamais de vue que la pension du retraité n’est pas une allocation sociale, ni une variable d’ajustement, mais un droit acquis pas le travail.
Au boulot !
Fabrice Brun, député de l’Ardèche.