Les zones où les voitures diesel sont les plus nombreuses sont aussi celles où les Français ont les revenus les plus bas, selon une étude de l’Argus que dévoile le journal Le Parisien dont voici l’article, écrit par Erwan Benezet, ci-dessous.

« Qui sont aujourd’hui en France les utilisateurs de diesel ? L’Argus, a voulu en savoir un peu plus. Dans une étude publiée ce samedi, que nous avons pu consulter en exclusivité, le groupe, spécialisé dans le conseil et l’édition dans le secteur de l’automobile, a établi une cartographie comparative des départements en fonction, d’une part de la densité de ménages non-imposables ; et d’autre part, du nombre de particuliers propriétaires d’un véhicule diesel.

« La superposition de ces deux cartes montre que le diesel est directement associé à la fragilité, analyse Thibaut Frank, éditorialiste à L’Argus. Pas forcément la fragilité d’un individu, car on peut évidemment être un propriétaire aisé de ce type de véhicule. Mais celle d’un territoire. » La corrélation apparaît en effet clairement entre les zones où le diesel est le plus répandu, et celles où les populations ont les revenus les plus bas.

« Parmi les zones urbaines dynamiques, détaille le spécialiste, marquées par une faible proportion de ménages non imposés, ainsi qu’un faible taux de diésélisation du parc, figurent par exemple l’Ile-de-France, l’Oise, l’ensemble du Lyonnais et des Savoie, les métropoles de Nantes (Loire-Atlantique), Bordeaux (Gironde), Toulouse (Haute-Garonne), Nice (Alpes-Maritimes), ou encore l’Alsace. »

A contrario, certains départements, certes très urbanisés et denses, mais marqués par une rupture industrielle forte, avec la présence d’une population fragilisée, comme le Nord, le Pas-de-Calais ou encore la Moselle, affichent des proportions importantes de diesels dans leurs parcs. Idem pour certains territoires ruraux, qui affichent des disparités notables.

Une majorité dans les territoires excentrés et fragiles

« La riche Côte d’Or, les caves champenoises de la Marne ou encore les fertiles plaines beauceronnes du Loiret présentent à la fois une faible part de ménages non-imposables et un taux de diésélisation inférieur à la moyenne nationale », précise encore l’éditorialiste de L’Argus.

Alors que les territoires les plus excentrés et les plus fragiles sont marqués eux par un parc automobile comprenant plus de 72 % de modèles diesel. Parmi eux : le Massif central, le Limousin, la Bretagne, les Pays de Loire, le Poitou, la Somme, l’Aisne, le Calvados, la Haute-Saône ou encore la Haute-Marne.

De quoi créer un effet « boule de neige ». Élisabeth Borne le martèle d’ailleurs depuis les Assises de la mobilité en décembre dernier : en France, une personne sur quatre aurait déjà refusé un emploi ou une offre de formation faute de moyens de transport pour pouvoir s’y rendre. La ministre des Transports va jusqu’à parler d’« assignation à résidence des plus fragiles d’entre nous ».

Grossit-elle le trait ? Le site Regionsjob.com a lui aussi mené une enquête, début novembre, sur ce sujet de la mobilité. Les conclusions ? « 81 % des Français en recherche d’emploi pourraient être découragés de postuler à une offre loin de chez eux en raison de la hausse du prix des carburants », constate David Beaurepaire, directeur délégué de Hellowork, qui édite Regionsjob.

D’où cette mise en garde de Thibaut Frank, de L’Argus : « Avec l’interdiction pure et simple du Diesel planifiée pour 2024 à Paris et 2030 pour l’Ile-de-France, c’est toute une population rurale qui va se retrouver dans l’impossibilité de se déplacer. De quoi accentuer encore un peu plus la fracture territoriale ».

Par Erwan Benezet avec Victor Alexandre et Stanislas de Livonnière – Le Parisien – 16 novembre 2018

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