L’intérêt d’une commission d’enquête sur la sécurité et la sûreté nucléaire associant des députés de tous bords était de sortir enfin du débat entre les « pour » et les « anti ».

Je regrette que le rapport qui vient d’être présenté n’évite pas cet écueil. C’est un rapport à charge contre la filière nucléaire qui ne crédibilise pas le travail parlementaire. En effet pourquoi introduire systématiquement de l’idéologie dans l’analyse avec comme postulat de ne jamais remettre en cause la parole des observateurs antinucléaires ? L’occasion de faire émerger un point de vue équilibré est manquée, c’est dommage.

Prenons l’exemple des piscines d’entreposage. Les plus hauts responsables de la défense nationale ont dévoilé aux membres de la commission des résultats de tests au lance-roquettes tout à fait rassurant démontrant que rien n’est à craindre sur ce point. Il est regrettable que le rapporteur n’ait pas accordé aux militaires et responsables compétents sur la sécurité dés piscines un crédit supérieur à celui octroyé aux partisans antinucléaires.

Même s’il faut bien reconnaître que nous sommes démunis face au secret défense. Bien évidemment, tout ne peut être rendu public, mais la mission constitutionnelle de contrôle des parlementaires ne peut pleinement s’exercer aujourd’hui. Il sera à cet égard intéressant de voir quelle suite entend donner le gouvernement à la proposition de notre commission d’enquête qui préconise l’habilitation au secret défense de 4 députés et 4 sénateurs, au sein d’une délégation parlementaire du nucléaire civil.

Car il n’y a pas lieu de nier que le nucléaire est une activité industrielle complexe et dangereuse. Mais il convient de rappeler que tout l’enjeu de la sûreté est de transformer ce danger maximal en risque minimal.

Pour le groupe « Les Républicains » il ressort de cette commission d’enquête que les infrastructures nucléaires comportent bien un danger intrinsèque, mais que les règles en matière de sûreté nucléaire permettent de maintenir les risques d’accident à un niveau faible. L’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) a d’ailleurs jugé globalement satisfaisante la sûreté des installations nucléaires françaises.

Bien sûr, aucune concession ne doit être faite tant sur la sécurité que sur la sûreté des installations nucléaires françaises. 

Rapporteur sur les crédits budgétaires consacrés à la prévention des risques à l’assemblée nationale, je vois d’un bon œil le renforcement des moyens et des compétences de l’ASN. Je remonterai au créneau lors des débats budgétaires pour 2019 pour conforter les crédits de recherche de l’Institut de Radioprotection et de la Sûreté Nucléaire (IRSN).

Tout n’est bien évidemment pas à jeter dans ce rapport où nous accueillons favorablement plusieurs propositions concrètes, comme par exemple la nécessité de flouter les sites nucléaires sur les outils numériques de type Google Earth, ou encore le renforcement du criblage et du suivi psychologique du personnel dans les installations nucléaires, y compris des sous-traitants.

Sur le nucléaire, comme tant d’autres domaines, la gestion par l’Etat des fichés S pose question et mérite débat. Car le véritable danger pourrait venir de l’intérieur. Il commande, comme dans la lutte sur le terrorisme dans laquelle notre pays est engagé depuis 2015, une véritable unité nationale.

Dommage donc que ce rapport à charge, aux titres chocs, ne fasse pas dans la nuance. A moins qu’il ne cherche à faire plaisir au Ministre de la Transition Écologique, Nicolas Hulot, qui souhaite faire inscrire dans la loi de Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE) pour 2023-2028, en cours de discussion, un échéancier de fermeture des centrales.

Réduire la part du nucléaire dans notre production d’électricité au profit des énergies renouvelables est un objectif qui ne peut que nous rassembler. À la condition de le programmer de façon pragmatique et non idéologique, au risque d’être condamnés à faire comme les allemands qui ont construit des centrales à charbon. Bonjour le bilan carbone à l’heure où la lutte contre le dérèglement climatique mobilise toutes les énergies !

Fabrice Brun, député de l’Ardèche

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