Ce conflit social est d’abord l’illustration de l’échec d’une méthode plombée par des annonces contradictoires. « Quand c’est flou, il y a un loup. » Les inquiétudes et les interrogations sont légitimes vis à vis d’un projet de réforme qui, plutôt que corriger les injustices, les accentue. En conséquence, respect pour le droit de grève qui est constitutionnel. Mais liberté pour chacun de travailler et de circuler.
Notre famille politique a toujours pris ses responsabilités sur les retraites en 1993, 2003 et 2010, avec des objectifs clairs, pour garantir le financement de notre système de solidarité par répartition entre les générations :
- Préserver le pouvoir d’achat des retraités en refusant toute baisse des pensions ;
- Protéger le pouvoir d’achat des actifs sans hausse des cotisations ;
- Assurer une retraite décente pour tous, y compris aux jeunes qui entrent aujourd’hui dans le monde du travail et qui sont pour le moins dubitatifs face à leur droit effectif à la retraite demain.
Cette réforme doit être un grand rendez-vous de concertation pour plus de justice sociale et d’égalité, avec notamment :
- plus aucune retraite inférieure à 1000€ dans notre pays ;
- des pensions de reversion sauvegardées ;
- une vraie reconnaissance de la pénibilité des métiers dans le BTP ou les EHPAD par exemple ;
- des acquis de la politique familiale sanctuarisés.
Nous avons besoin d’un vrai débat sur le financement, la durée de cotisation, les régimes spéciaux, l’harmonisation progressive public/privé…
Cela doit aussi être l’occasion d’ouvrir le champ à la réflexion sur la poursuite d’une activité en fin de carrière adaptée aux capacités de chacun, sur la transmission des savoir-faire entre les générations, car aujourd’hui notre pays perd trop de compétences qualifiées suite au départ insuffisamment préparé de nos anciens.
Nous avons aussi besoin de sortir d’une confrontation où les uns et les autres répètent mécaniquement leurs arguments. On ne peut pas faire fi de la complexité de notre système de retraite qui est tout sauf un jardin à la française. C’est plutôt un maquis de 42 régimes différents avec des distorsions entre les femmes et les hommes, les personnes handicapées et celles qui ne le sont pas…
Nous avons surtout besoin de temps. La Norvège, souvent citée en exemple, a mis 10 ans pour refondre son système de retraite ; dix ans de négociations.
Pour ma part, suite aux nombreux échanges en cette journée du 5 décembre, je me ferai l’avocat de la solidarité entre les générations, du temps et de la concertation, contre une réforme au forceps.
Fabrice BRUN, député de l’Ardèche.